Bussy : dix ans d’errance autour d’un pôle ludique mal calibré. Val d’Europe : quelques années pour concrétiser un projet ambitieux. Encore une démonstration que l’absence de vision est une impasse.

Annoncé en grande pompe en 2016, notre pôle ludique n’a jamais dépassé le stade des cartons, alors que le paysage concurrentiel s’est totalement transformé. Fin avril 2025, Val d’Europe a frappé fort : un méga complexe ludique haut de gamme a ouvert, porté par des leaders européens et des marques puissantes. Même concept, mêmes activités… mais avec des moyens colossaux et un pouvoir d’attraction énorme. Bussy et notre maire restent figés, avec un projet qui ressemble désormais à une pâle copie, très floue, mal ficelée, pas calibrée et dangereusement isolée à quelques kilomètres seulement d’un pôle d’attraction majeur déjà opérationnel.

Aujourd’hui, continuer comme si de rien n’était, c’est condamner Bussy-Saint-Georges à rester une ville périphérique-dortoir de seconde zone. Un musée des jeux vidéos pour les nostalgiques de consoles, n’y changera rien. Et une spécialisation dans le e-Sport ne nous fait pas rêver à l’heure où le monde des loisirs basculent dans les expériences physiques immersives pour sortir du tout écran !! Pourquoi il y a-t-il danger si personne n’impulse une nouvelle stratégie ?

Les promesses de la campagne municipale de 2016 et 2020 : un immense pôle ludique à l’entrée de Bussy

Dès la campagne électorale de 2016, notre maire brandissait son projet phare : un immense pôle ludique à l’entrée de Bussy, censé dynamiser une ville coincée entre Paris et Disneyland. On découvre le projet à coup de déclarations dans la presse : Karting électrique, patinoire, bowling, hôtellerie, restauration, et même piscine à vagues et toboggans du type Aquaboulevard avec simulateur de chute libre.

Sept ans d’immobilisme total. Puis soudain, dans le cadre du PLU, le projet ressurgit… sous un nouveau nom : « pôle high-tech et culturel » ! De l’Aquaboulevard et du simulateur de chute libre, on glisse doucement vers du e-sport, des laser games et du karting en réalité virtuelle. Un virage logique quand on sait que notre maire préfère le numérique au sport physique, avec un faible assumé pour le e-sport… comme nous l’avions déjà souligné il y a quelques semaines.

La dérive vers le tout-digital se confirme en juin 2022 : EpaMarne, propriétaire du terrain à l’entrée de la ville de Bussy, lance un appel à manifestation d’intérêt. Dans ce document au format appel d’offres, quelques précisions tombent : le pôle devra mêler loisirs, sports, spectacles, restauration… avec un « thème central » pour donner une identité au site. Et, sans surprise, l’e-sport est cité (décidément !). Le projet devra éviter de faire doublon avec les offres de loisirs existantes autour de Bussy-Saint-Georges, tout en misant sur des « locomotives » ou concepts innovants pour séduire habitants, touristes… et entreprises (séminaires, etc.).

10 ans après les promesses, on est toujours dans l’attente. Et à chaque fois que nous avons posé des questions lors des Conseils Municipaux, les seuls « locomotives » dont on a entendu parler c’est Burger King, KFC et autres chaines de fast food.

Ce que l’on sait du pôle ludique de Bussy aujourd’hui : peu de chose finalement

Dans le BussyMag n°226, on découvre enfin les contours du fameux pôle : 80 000 m² dédiés aux loisirs, avec en vedette Odyssée, un musée du jeu vidéo de 10 000 m² consacré à l’histoire des consoles : 2500 pièces avec un historique qui remonte jusqu’aux années 1060. Pourquoi pas, après tout.

Un parking silo (!!), un hôtel, des restaurants et une multitude d’espaces de loisirs viennent compléter l’ensemble. À côté du musée, une zone de 5 000 m² abritera un « village japonais » : rāmen, burgers, boutiques de figurines, cartes à collectionner (Pokémon, Yu-Gi-Oh!, One Piece) et vêtements estampillés « Ici Japon ». L’ambition : plonger dans la culture nippone.

Puis 30 000 m² seront consacrés aux loisirs numériques : karting 3D, laser game, réalité virtuelle…

Le tout pour un coût estimé à 60 millions d’euros.

Le pôle prévoit aussi une salle de spectacles de 1 500 places, baptisée Game Arena, principalement dédiée aux compétitions de jeux vidéo et de e-sport (!!). Des spectacles plus conventionnels seraient envisagés… mais c’est le grand flou : aucune garantie à ce jour. Ironie de l’histoire : une vraie salle de spectacle était déjà prévue à Bussy dès 2010… avant d’être sabordée il y a une dizaine d’années par notre maire.

L’ImagiPark qui a ouvert ses portes à Val d’Europe : Un million de visiteurs attendus

Le 23 avril 2025, Val d’Europe a frappé un grand coup : l’ancien Castorama fermé depuis quelques années a laissé place à un méga projet ludique. Sur 13 400 m² et quatre niveaux, tout est pensé pour devenir la destination incontournable des familles et des entreprises, avec 800 000 à 1 million de visiteurs attendus par an. C’est le plus grand complexe de loisirs dans un centre commercial en Europe.

À la manœuvre : Klépierre, leader européen des centres commerciaux (société cotée en bourse, 70 centres commerciaux leaders) et propriétaire de Val d’Europe, associé au leader européen du loisir de proximité Hadrena (ex-Otium Leisure, 50 centres en Europe). Leur ambition : offrir un pôle de loisirs hors normes pour capter les flux de 20 millions de visiteurs annuels du centre commercial Val d’Europe, de La Vallée Village et de l’Aquarium See Life… mais aussi prolonger les séjours des touristes de Disneyland grâce à des horaires d’ouverture tardifs.

Déjà opérationnels :

  • Fort Boyard Aventures : 30 cellules mythiques sur 1 000 m² pour relever les célèbres défis de l’émission télé.
  • Speedpark : un mastodonte du divertissement familial (karting électrique, bowling, laser game, billard, karaoké, quiz) sur plus de 5 000 m², avec un café panoramique insonorisé pour surveiller les enfants.

À venir dans les prochains mois :

  • Kojump, une plaine de jeux XXL de 1 300 m² pour les 3-15 ans (trampolines, murs d’escalade, arènes).
  • Un espace réalité virtuelle de 1 000 m² pour des expériences immersives dernier cri.
  • Activate, le concept canadien futuriste qui mixe entrainement physique et technologie dans un univers interactif immersif sans manette ni écran statique.
  • Gold’s Gym, une salle de sport de 3 500 m².
  • Un espace séminaire privatisable de 800 m² dédié aux entreprises pour accueillir jusqu’à 500 participants.
  • Ephemera, le restaurant immersif événementiel (500 places), qui ajoutera une expérience immersive gastronomique inédite.

En tout, 15 millions d’euros ont été investis par Hadrena, avec 30 % financés par Klépierre, pour créer ce nouveau temple du loisir européen.

A Bussy, un projet flou, mal calibré, voire surdimensionné, et dangereusement isolé. Attention danger !

À Bussy, le projet annoncé est colossal : 25 000 m² dédiés aux activités ludiques — escape games, laser games, espaces sportifs, piste de karting façon Mario Kart… En théorie, le projet serait presque deux fois plus grand que celui de Val d’Europe !! Sauf qu’il lui manque trois locomotives essentielles : un centre commercial majeur, La Vallée Village et Disneyland. En marketing territorial, c’est une folie pure.

Les doutes sont nombreux. Peut-on sérieusement espérer faire vivre 25 000 m² dédié aux loisirs avec quelques restaurants, des rāmen shops et des boutiques japonaises de figurines et de cartes à collectionner ? Un musée du jeu vidéo, tourné vers les nostalgiques des premières consoles, suffira-t-il à animer durablement un tel espace face à une génération avide d’expériences immersives et physiques — pour qui les consoles d’antan sont de simples reliques ?

Lorsque nous avons posé ces questions en Conseil Municipal (janvier 2025), la réponse fut déconcertante : « Nous avons sous-traité. BDM sait ce qu’il fait. ». BDM, c’est le promoteur local basé à Montévrain qui porte le projet ! soyons lucides : BDM, entreprise familiale locale, est loin du calibre des deux géants européens qui pilotent le projet de Val d’Europe. Son expérience se limite à 2 retail parks et 3 pôles de loisirs locaux dans les périphéries de grandes villes — rien de comparable à la gestion d’un mastodonte de cette ambition.

Pendant que Val d’Europe déploie un projet emblématique cohérent qui renforce son statut de machine à capter les flux touristiques en provenance de Disneyland, Bussy s’enlise dans un projet flou, mal calibré, voire surdimensionné, et dangereusement isolé… qui vient de prendre d’ailleurs encore deux ans de retard !

À quelques kilomètres d’un site déjà opérationnel, que pourra-t-on inventer à Bussy pour faire réellement la différence ? Pour l’instant, nous n’avons aucune réponse et nous sommes très inquiets.

La ville vendu au E-Sport !!

Pire encore, Bussy se spécialise aujourd’hui dans l’e-sport et les jeux vidéo, au moment même où le marché du loisir explore de nouvelles pistes autour d’expériences plus physiques. Nous misons sur un modèle digital d’hier quand Val d’Europe construit le modèle hybride de demain.

Enfin, il ne faut pas oublier que le secteur du loisir est ultra-concurrentiel : 600 parcs de loisirs en France, plus de 70 millions de visiteurs annuels, une fréquentation captée à 80 % par une poignée de parcs d’envergure nationale ou internationale comme Disneyland. Bussy n’affrontera pas seulement L’ImagiPark de Val d’Europe. Autour de nous, ce sont déjà 9 centres ludiques qui se partagent le marché local.

Si rien ne change, Bussy risque non seulement l’échec, mais aussi un déclassement déjà entamé, visible notamment à travers une offre hôtelière bien pauvre pour une ville située aux portes du premier pôle touristique d’Europe : Disneyland Paris.

Une réponse sur “Bussy : dix ans d’errance autour d’un pôle ludique mal calibré. Val d’Europe : quelques années pour concrétiser un projet ambitieux. Encore une démonstration que l’absence de vision est une impasse.”

  1. Excellente publication qui analyse parfaitement la situation,

    Nous nous faisons balader depuis 10ans avec un pôle ludique…..
    Là, sort du chapeau à Val d’Europe un projet clé en mains operationnel avec PAS UN POIL D’ARGENT PUBLIC .
    Là à Bussy-Saint-Georges, nous mélangeons tout : Argent Public et Argent Privé avec un local municipal Esport géré par la Société privée qui finance éventuellement le musée du jeu vidéo qui ouvrira en 2028 .
    Ce local Esport a déjà coûté aux contribuables de Bussy-Saint-Georges plus de 800000€ !
    Cela fait quelques entrées avec nos enfants et petits enfants à ImagiPark Val d’Europe.
    La gabegie financière à Bussy-Saint-Georges Saint-Georges a assez duré !
    La Chambre Régionale des Comptes ne devrait pas tarder à mettre son nez là dedans !

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